Chercheurs de trésors, archéologues de l’Art, découvreurs passionnés… Voilà comment pourraient être qualifiés ceux qui, comme moi, consacrent une grande partie de leur existence à rechercher des œuvres disparues ou inédites. De Léonard de Vinci au Caravage, en passant par Gustave Courbet et Vincent van Gogh, nombreux sont les artistes dont certaines œuvres oubliées (parfois des plus importantes) restent à être (re)découvertes, sommeillant dans de sombres greniers ou autres caves ignorées. Contrairement à une idée répandue, parfois même entretenue par certains acteurs du marché et de l’histoire de l’art, le corpus de bien des artistes majeurs est loin d’être définitivement clos. Pour preuve, la découverte récente du Salvatore Mundi de Léonard de Vinci ou du Portrait de jeune homme de Rembrandt, merveilleusement remis en lumière par le marchand hollandais Jan Six. Souvent sujettes aux plus violentes controverses (on songera au fameux Brouillard d’Arles faussement attribué à van Gogh ou à l’improbable tête de l’Origine du monde de Courbet) ces trouvailles n’en passionnent pas moins un très large public toujours avide de nouveautés et de sensationnel.

 

Pour ma part, j’ai eu la chance de retrouver plusieurs tableaux et dessins originaux disparus depuis plus d’un siècle, qui étaient totalement inconnus du public et des spécialistes. 
Parmi eux, une grande toile de Gustave Courbet, le célèbre chantre du réalisme en peinture, représentant une Baigneuse dans un paysage, exposée pour la première fois de son histoire en octobre 2019 au musée Gustave Courbet d’Ornans. On l’imagine aisément, une telle découverte, probablement le plus imposant tableau inédit du maître sorti de l’oubli, suscite une émotion et une joie intenses chez celui qui la réalise. 
Il y a quelques années, une autre de mes belles aventures fut la découverte d’un carnet de dessins inédits d’Eugène Delacroix, dont sa célèbre Liberté guidant le peuple est devenue l’une des grandes icônes de la peinture française. Son propriétaire, collectionneur et amateur d’art, l’avait acheté pour quelques pièces de monnaie sur un marché aux puces de la région parisienne. Il ignorait tout de son auteur, et fit appel à moi pour l’aider dans ses recherches. Rendez-vous pris, il me montra le fameux carnet constitué d’une vingtaine de feuillets remplis d’études et de croquis magnifiquement dessinés. Deux années d’une enquête minutieuse furent nécessaires pour emporter la conviction des experts et des spécialistes du peintre. Face à la nouveauté et aux œuvres dénuées de toute provenance traçable, les résistances sont généralement très fortes. Mais la victoire tant espérée fut bel et bien au rendez-vous : notre carnet fut adjugé lors d’une prestigieuse vente aux enchères chez Artcurial, et finit par rejoindre les collections d’une institution. 
 

Ne nous y trompons pas : faire reconnaître l’authenticité d’une œuvre d’art inédite dépourvue de toute trace archivistique est un véritable combat, une aventure semée d’embuches, parfois décourageante, nécessitant la mise en place d'une démarche rigoureuse, combinant intuition et méthode scientifique. Peu nombreuses sont les œuvres de cette nature à franchir la ligne d’arrivée. Dans un monde où chacun a son mot à dire, il faut s’attendre à recevoir des coups et à encaisser les opinions les plus contradictoires. Les périodes d’abattement ne sont pas rares, les déconvenues nombreuses, mais mon expérience m’a appris qu’il fallait éviter de se laisser entamer par le doute d'interlocuteurs pessimistes et inaccessibles au rêve, si important en matière de découvertes... 

La plupart des œuvres réunies ci-dessous ont été acquises par mes soins lors de ventes aux enchères, marchés d’antiquaires, brocantes ou confiées par des particuliers qui ignoraient l’identité de leurs auteurs. Dénuées de toute attribution ou décrites de manière erronée, elles ont fait l’objet d’un travail d’enquête minutieux ayant conduit à leur identification, confirmée par les experts spécialistes faisant autorité, que je m’empresse de remercier.